
Réponses au questionnaire de Halte à l’Obsolescence Programmée (HOP)
Préambule : L’obsolescence programmée est intrinsèque au système capitaliste puisque c’est une stratégie qui lui permet de renouveler d’autant plus souvent la « demande » que courte est la durée de fonctionnement ou d’existence d’un bien matériel ou immatériel. C’est également une des principales sources de déchets puisque la course au profit et à la rentabilité pousse à des productions sans filières (ou si peu) de recyclage, de traitement, ou de dépollution connues ou suffisamment déployées, ce qui conduit à ce que les pays et territoires pauvres deviennent les « poubelles » des pays et territoires riches. Enfin cette obsolescence conduit à produire toujours plus pour remplacer les biens défectueux et donc amène à accroître l’utilisation des ressources, le gaspillage d’énergie et une hausse de la quantité de travail ce qui est une aberration sociale et environnementale qui dégrade les écosystèmes et usent les corps.
Aussi le NPA est pleinement attentif aux mesures structurelles permettant de se débarrasser de l’obsolescence programmée et nous pensons qu’elles sont urgentes à mettre en place de manière démocratique par les travailleur.ses et les habitant.es des territoires. Cela en réinterrogeant l’ensemble des biens produits, pas seulement le domaine électrique et électronique. D’une certaine manière de nombreux combats que nous menons ou soutenons – notamment écologiques et sociaux – ont une forte dimension de lutte contre ce problème majeur. Pour terminer ce préambule nous ajouterions le fait que la société de demain doit se faire selon la perspective : produire moins, produire mieux, vivre mieux.
1. Coût de la réparation : Alléger le coût de la réparation, en réduisant la fiscalité sur les services de réparation et produits reconditionnés et en doublant le montant du fonds de réparation dédié aux produits électriques et électroniques (prévu dans la loi AGEC).
Nous sommes évidemment pour faciliter les possibilités de réparation (infrastructures, moyens financiers, nombre de travailleur.ses suffisamment nombreux.ses. Cependant les baisses de fiscalité ne peuvent être interrogées à notre sens qu’en posant en parallèle une nécessaire hausse des revenus (notamment des salaires) afin de pouvoir satisfaire les besoins fondamentaux. Car sans cela quel que soit le niveau de fiscalité, un budget « réparation et entretien » ne sera que minime ou inexistant pour les millions de ménages précaires qui de manière logique prioriseront leur budget en direction du logement, de l’alimentation, de la santé.
Les baisses de la fiscalité sont bien souvent plus bénéfiques à l’employeur qu’à la population (qui en assure de fait le coût) car souvent non contraignantes. Nous exprimons donc une certaine réticence à baisser les fiscalités car de manière quasi permanente c’est la population qui en subit les pertes. Du moins dans l’optique qui est la nôtre, la fiscalité doit correspondre aux intérêts du plus grand nombre et non d’une minorité de privilégiés qui profite de défiscalisations majeures continues, additionnées de subventions conséquentes et pour beaucoup injustifiées.
Aussi, nous sommes pour engager une profonde remise en cause de la TVA allant jusqu’à sa suppression. En particulier sur les produits de premières nécessités dont le domaine de la réparation fait partie.
2. Transparence sur la durabilité : Imposer l’indice de durabilité sur tous les produits du quotidien (imprimantes, petit électroménager, textile…) et instaurer un compteur d’usage obligatoire sur les produits électroniques.
Nous sommes pour ce genre de mesures qui peut aiguiller les producteurs-consommateurs et productrices-consommatrices dans un choix rationnel, adapté à leurs besoins. Mais un indice reste limité tant que nous ne sortons pas des types de productions actuelles.
En revanche nous sommes opposés à ce que des entreprises et des administrations soient directement connectés aux appareils ayant un compteur se trouvant en possessions des individuEs comme ce peut être le cas pour les compteur électrique Linky.
3. Garanties légales : Étendre la durée de garantie en fonction de la durée de vie attendue de l’objet.
Oui tout à fait. Mais en complément, nous ajouterions qu’il faudrait imposer aux fabricants une durée de « vie » minimale en fonction des catégories de biens produits et que cela doit se faire en fonction des possibilités concrètes et entières de recyclage et de réinsertion dans un cycle de production ou dans le cycle biologique. En résumé que la production initiale ne se fasse que si on peut garantir le fait que le bien produit (ou ses différentes parties séparées) se retrouve dans un cycle et non à l’état de déchet en attente, brûlé ou enfoui.
4. Formation à la réparation : Encourager les formations à la réparation dans les collèges, lycées professionnels et la formation professionnelle.
Nous sommes également pour mais cela implique de redonner massivement des moyens aux établissements scolaires de fonctionner que ce soit en termes matériels financiers ou de personnels suffisants. Cela implique aussi de sortir des programmes scolaires tels qu’ils sont faits depuis des années et en particulier sous Blanquer où la concurrence et l’esprit de croissance sont de mise sans critiques de fond du système capitaliste que ce soit du collège jusqu’à l’enseignement supérieur ce qui est antinomique avec une lutte contre l’obsolescence programmée sous quelque forme qu’elle soit.
Aussi il serait intéressant d’élargir ces types de formations à l’échelle des quartiers ou des villages avec la mise en place d’ateliers avec des machines et des outils disponibles pour toutes et tous. La aussi sur le principe de la gratuité ou de manière très peu chère, participative.
5. Publicité et obsolescence culturelle : Réguler la publicité pour réduire les incitations à la surconsommation. Exemple : interdire certains contenus incitant au gaspillage et au renouvellement accéléré des produits ; imposer un message dans les publicités pour les produits soumis à l’indice de réparabilité tel que “Pour un produit plus durable, référez-vous à l’indice de réparabilité”.
Nous sommes pour la surpression de la publicité commerciale dans son entièreté qui est un des moyens principaux pour le capitalisme de trouver des débouchés commerciaux avec la constitution de nouveaux marchés. Car la publicité « construit » des besoins non réels, compulsifs, et tend à la surconsommation, génère de la frustration qui pousse aux achats compulsifs.
En revanche nous sommes pour un fort élargissement des mesures d’information sur les usages courants et sur les besoins fondamentaux, sur la qualité des produits, sur leurs nuisances potentielles pour la santé ou l’environnement et sur la manière d’éviter ces nuisances. Que ce soit dans l’espace public matériel (rues, services publics, maisons de quartiers etc) ou immatériel (audiovisuel). Les sommes colossales du marché de la communication en France en 2021 (environ 31 milliards d’euros, émanant fortement du privé) devraient être récupérées sans indemnités pour permettre le financement de ces mesures d’informations sur les usages courants et sur les besoins fondamentaux précédemment cités. A défaut de surplus, ces sommes récupérées pourront être redirigées vers les mesures précédemment évoquées plus haut dans le questionnaire
6. Obsolescence numérique : Garantir des services d'intérêt public “Zero obsolescence digitale”. Exemple : interdiction de service bancaire non disponible sans une application, maintenir les services d’audioguide dans les musées, garantir l’accès aux transports publics avec ou sans application ou smartphone grâce à l’envoi minimum de billet par email…).
Nous sommes pour le maintien des services publics de proximité de manière physique avec du personnel présent et suffisant en nombre. Que ce soit en ville ou à la campagne. Quand bien même ces services puissent être complétés ou doublés d’outils et de portail en ligne.
De fait nous sommes fortement opposéEs aux transferts complets des services préexistants physiquement vers le numérique. De même que nous sommes opposéEs à ce que les nouveaux services proposés n’aient pas d’existence physique et ne soient accessibles que part applications en ligne.
Enfin concernant les transports en commun, nous sommes pour leur déploiement massif et leur gratuité pour faire reculer en fréquence et en volumes globaux l’utilisation de l’automobile qui pour de multiples raisons dégrade fortement l’environnement. Automobiles qui sont la majorité du temps non utilisées et qui représentent ainsi une forme substantielle d’obsolescence programmée. Aussi, nous militons pour des mesures avant tout globales, plutôt que point par point, sujet par sujet, mais de fait avec la gratuité des transports en commun, la question des billets numériques ne se posent plus.
Pour information, les autres propositions de HOP :
Mettre fin à l'obsolescence technique
1. Renforcer les contrôles de l’indice de réparabilité.
Plutôt que les contrôles de l’indice de réparabilité (indice qui reste à définir, à construire en profondeur), nous sommes plutôt favorables à la remise en cause profonde de la manière de produire et aller sur comme précédemment cité, une extension de la durée de vie des biens et ne les produire qu’à condition de pouvoir in fine les réintroduire en totalité dans un cycle de production ou biologique sans détruire l’écosystème.
Ainsi, une fois fait et avec un déploiement global des infrastructures de réparation (ateliers, formations, personnels suffisamment nombreux), un renforcement des contrôles de réparabilité peut être utile pour gagner en efficacité et solidifier ls actes de préservation de l’environnement. Mais sans sortie du système de production capitaliste actuel, ces contrôles restent de surface, marginaux, hors-sujets par rapport à l’urgence environnementale dans laquelle nous nous trouvons. Voire des leurres pour poursuivre des productions dont les taux de réparation ou de recyclage finaux sont très minimes et dont les restes sont délestés dans des pays pauvres, en Afrique notamment.
2. Créer un site web public Observatoire de l’indice de réparabilité et durabilité.
Nous renvoyons à la réponse précédente. Peut être utile en théorie, mais extrêmement limité en efficacité et en sincérité tant que l’on poursuit le système de production actuel, c’est-à-dire le système de production capitaliste et prédateur.
3. Accroître la transparence de l’indice de réparabilité ou durabilité, notamment en rendant obligatoire la mise à disposition de la grille de calcul détaillée, et en obligeant les fabricants à expliciter les engagements afférents à chaque critère (délais de livraison des pièces, durée de disponibilité de chacune des pièces prise en compte, etc).
Nous renvoyons également aux deux réponses précédentes.
4. Garantir la disponibilité réelle des pièces détachées de tous les produits électriques et électroniques de consommation courante au minimum durant leur durée de vie moyenne.
Nous sommes pour mais ajouterions ce que nous répondions précédemment. C’est à dire qu’il faut imposer aux fabricants une durée de « vie » minimale en fonction des catégories de biens produits et que cela doit se faire en fonction des possibilités concrètes et entières de recyclage et de réinsertions dans un cycle de production ou dans le cycle biologique.
5. Exonérer les produits reconditionnés de la redevance copie privée et réduire le taux de TVA sur les services de réparation et de reconditionnement.
Nous vous renvoyons vers la réponse à la question « 1. Coût de la réparation »
6. Offrir un crédit d’impôt aux consommateurs pour la souscription à un service de maintenance et d’entretien annuel des équipements multimédias et électroménagers.
Nous n’avons pas encore d’avis clarifié à ce stade sur la question posée.
7. Doubler la dotation pour le fonds réparation à destination des produits électriques et électroniques afin de réduire significativement la facture de réparation des citoyens.
Nous vous renvoyons vers la réponse à la question « 1. Coût de la réparation »
8. Instaurer un bonus-malus financier pour les produits en fonction de leur conception durable et réparable.
Nous vous renvoyons vers la réponse à la question « 1. Coût de la réparation »
9. Investir dans des programmes de recherche et innovation en faveur de la conception de produits durables, robustes, réparables et modulaires et faciles d’entretien.
Nous sommes pleinement pour, à condition que ce soit fait sous domaine public, avec possibilité pour la population de donner son aval sur les types de recherches à mener. En particulier sur celles à prioriser. Et bien sûr sur la possibilité donnée à la population d’interrompre temporairement ou de stopper les programmes de recherches qui conduiraient à des risques trop élevés l’impossibilité d’assurer le contrôle de leurs résultats.
10. Élargir le droit d’alerte au thème de l’obsolescence programmée afin de permettre de recueillir des témoignages de lanceurs d’alerte sur des pratiques d’obsolescence des fabricants.
Nous sommes pleinement pour également, car c’est en plus une nécessité démocratique. Il faudrait compléter cet élargissement du droit d’alerte en levant l’opacité (malheureusement souvent permise par la loi) des contrats passés sous « secret du commerce » ou « secret des affaires » qu’ont endurci E. Macron et ses prédécesseurs.
Nous sommes pour le retour des CHSCT avec des pouvoirs élargis à l’environnement et à la qualité des productions (en particulier contre l’obsolescence programmée) afin que cette instance de représentation des salarié.es puissent jouer pleinement son rôle de lanceur d’alerte.
11. Étendre l’obligation de publication d’un schéma des achats responsables à toutes les collectivités et à la fonction publique hospitalière.
Mettre fin à l’obsolescence numérique
12. Imposer la dissociation des mises à jour nécessaires et non nécessaires au maintien de la conformité des biens au niveau européen.
Si par « niveau européen » est entendu dans la question « Union européenne », il nous paraît impossible d’apporter une réponse adéquate tant les conformités économiques de l’UE sont pro-croissance, pro-business et favorise sans critiques structurelles le déploiement du tout- numérique qui implique pourtant de très forts dommages sociaux et environnementaux.
13. Mettre en place une garantie logicielle, en imposant aux fabricants de biens comportant des éléments numériques et aux éditeurs de systèmes d’exploitation de fournir gratuitement les mises à jour nécessaires au maintien de la conformité du bien pendant une durée d’au moins 10 ans.
La réponse serait plutôt oui, mais que faire au bout de 10 ans si le simple aspect ne suit plus alors que le reste du bien produit est toujours fonctionnel et utilisable. La question est à notre sens plus global et ne peut être une simple durée de garantie.
14. Imposer l’éco-conception logicielle des sites web.
Le sens de la question nous parait trop large pour répondre sans plus de précisions tant les considérations et définitions « d’écoconception logicielle des sites web » diffèrent.
Mettre fin à l’obsolescence culturelle
15. Appliquer une éco-contribution sur la publicité, afin de financer des campagnes pour des organisations à but non lucratif ou de sensibilisation pour la protection de l’environnement.
Voir réponse précédente : « 5. Publicité et obsolescence culturelle : »
16. Offrir des espaces publicitaires gratuits pour la transition écologique sur les chaînes TV publiques.
Voir réponse précédente : « 5. Publicité et obsolescence culturelle : »
17. Initier une campagne de sensibilisation publicitaire de l’Etat sur l’indice de durabilité ou réparabilité, le fonds réparation, l’impact environnemental du renouvellement à neuf de produits.
Les campagnes de sensibilisation publicitaire sur la durabilité ou réparabilité des produits sur les différents fonds et ateliers de réparation, sur l’impact environnemental est une priorité. Mais cela doit largement dépasser la seule « niche » de l’État. Toutes les collectivités doivent le faire de même que dans les divers services publics. De même que tous les fabricants, toutes les entreprises.
Cependant la lutte contre la dégradation des écosystèmes ne peut s’appuyer uniquement sur la (bonne) volonté des individuEs qui pour beaucoup n’ont pas le choix de leur consommation ou n’ont que très peu de marge de manœuvre sur elle car il faut pour cela du temps disponible, des revenus suffisants. Que des produits plus sains, moins impactants soient produits et cela ne peut se faire qu’en changeant radicalement la « nature » des biens produits, c’est à dire en changeant en profondeur l’appareil productif. Les luttes écologiques, sociales et démocratiques en sont le premier appui.
Vos commentaires et vos autres propositions : Il est nécessaire de réorienter fondamentalement l'économie, l'organisation des sociétés, de sortir du système marchand productiviste basé sur les rentabilités maximales du capital. Au contraire, il est utile de mettre en place une planification écosocialiste, où les choix concernant notre façon d'habiter la planète seront discutés, débattus collectivement.